Contenu | Rechercher | Menus

Annonce

Si vous avez des soucis pour rester connecté, déconnectez-vous puis reconnectez-vous depuis ce lien en cochant la case
Me connecter automatiquement lors de mes prochaines visites.

À propos de l'équipe du forum.

#1 Le 29/11/2012, à 22:37

K4ede

Viols, les voix du silence

Bonsoir à tous,

Je voulais partager avec vous un nouveau site qui a été créé à l'occasion de la journée des violences faites aux femmes : Viols, les voix du silence. Il permet à toutes personne de prendre la parole pour raconter son viol (ou autre violence sexuelle). Le nombre de témoignages est assez affolants quand on sait que le site n'est en ligne que depuis quelques semaines !

Vous trouverez mon propre témoignage ici : Élise (vous me pardonnerez les fautes, on va mettre ça sur le compte de l'émotion wink )

La plateforme ne propose malheureusement pas d'espace de discussion (ou alors bien caché), je vous propose donc d'en parler ici si le coeur vous en dit (et si cela ne contrevient pas aux nouvelles règles du forum, mais je ne crois pas qu'il y ai quoi que ce soit de politique là dedans).

Dernière modification par K4ede (Le 29/11/2012, à 23:49)

Hors ligne

#2 Le 29/11/2012, à 22:53

ginette

Re : Viols, les voix du silence

Bonsoir,
C'est très courageux ce que tu as fait et ce sont des choses dont il faut parler. Ton témoignage vaut autant que n'importe lequel.
J'ai passé une partie de ma scolarité dans un bahut de curés. Il ne m'est jamais rien arrivé mais à mes copains si, à tel point que c'étatit devenu pour certains, une sorte de jeu que de se faire "convoquer" pour une révision des devoirs en cours particuliers, parce que ensuite, ils se le racontaient entre eux en se marrant. Et je ne parle pas des séances de piscine
Parfois j'y repense en me disant que ceux qui, à l'époque, trouvaient ça drôle...ben ça doit leur faire tout drôle aujour'd'hui de réaliser que la partie de rigolade à laquelle ils se prêtaient à 12/13 ans n'était en fait qu'une partie de tripotage initiée par des frustrés en soutane. Pareil pour ce qui concerne les "combats" et les parties de touché/coulé dans la piscine.

Dernière modification par mrey68 (Le 29/11/2012, à 22:54)

#3 Le 29/11/2012, à 23:09

peterp@n

Re : Viols, les voix du silence

Respect, il faut du courage pour raconter ça. Du coup j'ai lu un autre témoignage mais pas plus c'est vraiment dur.


Ubuntu 14.04 64bits, Raspbian “wheezy”, Tango Studio sauce debian
Assistance - Développement - Formations FreeCAD (logiciel 3d)

Hors ligne

#4 Le 29/11/2012, à 23:48

K4ede

Re : Viols, les voix du silence

Du courage, c'est surtout la première fois qu'on le dit qu'il en faut. Maintenant, pour moi, c'est plus une question de culot, parce que c'est difficile de lancer un tel sujet, ça vient rarement spontanément dans la conversation. Je profite de l'occasion qui m'est donnée avec ce site pour en parler un maximum autour de moi et essayer de briser le tabou.

mrey68, concernant tes amis, ils en riaient sans doute pour se rassurer, mais je suis sûre qu'au fond d'eux ils sentait mal à l'aise. Quel dommage qu'aucun "adulte responsable" ne les ai entendus !

Hors ligne

#5 Le 30/11/2012, à 11:44

Marie-Lou

Re : Viols, les voix du silence

Le numéro de novembre (#29) de la revue Causette consacre quelques pages au viol. C'est sans doute trop court et succinct pour celles et ceux qui auraient déjà été informé·e·s à ce sujet mais ça rappelle l'essentiel.

Ça rappelle qu'on estime à 75 000 le nombre de femmes violées par an, qu'on a dix fois moins de plaintes déposées, et que seules 2 % des accusés sont condamnés.
Ça rappelle aussi que le procès n'est pas nécessairement une libération pour la victime, mais une nouvelle épreuve, puisque la défense joue sur l'idée que la victime est « présumée consentante ». L'article évoque une histoire récente, le viol pendant 5 ans de deux sœurs de 11 et 12 ans, violées par leur père, leur oncle, des voisins (le tout étant filmé). Or, il a été dit durant le procès qu'elles étaient consentantes et même « provocantes »…
Ça rappelle également que les trois-quarts des victimes connaissent leur violeur et que l'emprise physique se double d'une domination psychologique forte. Et l'on s'étonne, et parfois on reproche à demi-mot, que la victime n'ose dire un mot durant de nombreuses années…

Heureusement, tout cela, c'est du passé. On est dans une génération qui n'a d'ailleurs pas besoin du féminisme.


Compte clôturé

Hors ligne

#6 Le 30/11/2012, à 13:28

K4ede

Re : Viols, les voix du silence

Tiens, en passant, je voudrais attirer l'attention sur les expressions suivantes :
"Je me suis fait violée"
"J'ai été violée"
La première sous entend largement un consentement, voir une demande de la victime, elle prend une part active au viol. Comme quoi, le "elle l'a bien cherché" est ancré profondément dans notre vocabulaire...

Dernière modification par K4ede (Le 30/11/2012, à 13:52)

Hors ligne

#7 Le 30/11/2012, à 13:46

Sopo les Râ

Re : Viols, les voix du silence

« Je me suis fait agresser. »


La sieste, c'est maintenant.
   * * *
« J'ai l'intention de vivre éternellement. Pour l'instant, tout se passe comme prévu. »

Hors ligne

#8 Le 30/11/2012, à 14:41

Elzen

Re : Viols, les voix du silence

C'est le genre de messages auxquels on ne sait pas trop quoi répondre…

Le sentiment de culpabilité que ressente les victimes est en effet assez curieux. Je ne sais pas ce qu'on pourrait faire, au juste, contre ça…

K4ede a écrit :

Tiens, en passant, je voudrais attirer l'attention sur les expressions suivantes :
"Je me suis fait violée"
"J'ai été violée"
La première sous entend largement un consentement, voir une demande de la victime, elle prend une part active au viol. Comme quoi, le "elle l'a bien cherché" est ancré profondément dans notre vocabulaire...

On a déjà discuté de ça dans le sujet sur le sexisme (pages 45 et surtout 46), et pas mal de gens ont l'air d'avoir du mal avec ce genre de nuances.
Le truc est ici, je pense, que pas mal de formes en « se faire XXX » sont utilisées dans un sens purement passif (« se faire mal », « se faire arrêter », « se faire arnaquer », etc.), donc pas mal de gens qui n'ont pas de soucis particuliers avec ça ont du mal à envisager la chose autrement qu'à son sens passif, ce qui fait qu'ils ne voient pas le problème (confer les réponses d'à peu près tous les intervenants à part Grünt et moi-même hmm) ; mais que si le sens est bien passive, la forme est active, et c'est, je pense, ce qui vient d'abord à l'esprit des gens qui subissent ce sentiment immérité de culpabilité.

Hors ligne

#9 Le 30/11/2012, à 15:17

Marie-Lou

Re : Viols, les voix du silence

ArkSeth a écrit :

Le sentiment de culpabilité que ressente les victimes est en effet assez curieux. Je ne sais pas ce qu'on pourrait faire, au juste, contre ça…

Ça fait un peu « réponse facile », mais je dirais, l'éducation…

Y'a, entre autres, un témoignage très intéressant, celui de Lucie, qui démontre bien la nécessité de l'éducation. Pour elle-même déjà (parce que son premier viol, elle n'a pu le définir ainsi qu'après-coup, après qu'elle y ait été « intellectuellement » préparée : La deuxième fois [qu'elle a couché avec un même mec], je ne l’ai pas perçu comme viol, je connaissais pas la socio, ni les théories féministes. Mais j’avais dit non, il m’avait immobilisée par les poignets alors que je voulais partir de chez lui. J’avais fini par céder, sans aucune envie, mais je m’étais laissée faire, ça craignait de pas coucher à 18 ans, il fallait bien passer par là.) et pour les acteurs qui sont censés entourée la victime :

- les flics (je vais dans le bureau de l’agent, ou je ne sais quel grade, chargé du viol. Le bureau est très petit, il y a des affiches macho de rugby sur les murs. Je raconte les faits au commissaire, je ne suis que larmes depuis quelques jours. Je suis incapable de marcher seule dans la rue, je ne fais que pleurer, tout le temps. Ses collègues et lui, tous rugbyman, me disent que si j’avais été leur fille, quelle idée de mettre une jupe, on rentre pas chez les inconnus… Je leur cite sèchement les articles de loi concernant le viol, que je connais par cœur, et leur rappelle leur unique fonction, qui est de prendre ma déposition. Ca leur plaît vraiment pas. Ils me demandent la description physique de l’agresseur, je la donne, je cite la réponse du type : « Je note, un individu de race noire », je suis sur le cul. Ils m’engueulent, m’expliquent les critères d’un vrai viol : ça aurait dû se passer en pleine rue, avec des témoins, une caméra de vidéosurveillance à proximité, j’aurais dû venir au commissariat en ayant rien touché ni à mes fringues ni au sperme du violeur, avec des coups sur la gueule. Ca c’est un vrai viol.)

- les psys (je lui raconte mon agression, en mentionnant les termes « domination masculine », « patriarcat ». Réponse : « qu’est-ce que vous avez dans la tête, vous êtes complètement folle ». Je crois rêver.)

- les proches (Quelques semaines plus tard, je l’annonce à mes amies, de retour dans ma petite ville de province. Elles changent de sujet et parlent des supers affaires de chaussures qu’elles ont eues avec les soldes. Une autre réagit, me crache à la gueule que je l’ai bien mérité, que je suis pas toute blanche, et que ça lui démange de me filer une baffe.)

La question de la culpabilité me semble être totalement liée à la question politique (j'espère ne pas faire fermer le topic) de ce qu'est le viol, de ce qu'il charrie de représentations inhérentes à la sexualité, aux rôles sociaux de femmes et d'hommes, etc.
(Je parle donc ici spécifiquement des viols commis par des hommes envers des femmes)

Dernière modification par Marie-Lou (Le 30/11/2012, à 15:17)


Compte clôturé

Hors ligne

#10 Le 30/11/2012, à 15:32

Julientroploin

Re : Viols, les voix du silence

Marie-Lou a écrit :

L'article évoque une histoire récente, le viol pendant 5 ans de deux sœurs de 11 et 12 ans, violées par leur père, leur oncle, des voisins (le tout étant filmé). Or, il a été dit durant le procès qu'elles étaient consentantes et même « provocantes »…

Consternant comme ligne de défense...
À tout hasard, je rappelle que la loi considère qu'un mineur n'est pas apte à exprimer un consentement face à un adulte avant 15ans...

K4ede a écrit :

Tiens, en passant, je voudrais attirer l'attention sur les expressions suivantes :
"Je me suis fait violée"
"J'ai été violée"
La première sous entend largement un consentement, voir une demande de la victime, elle prend une part active au viol. Comme quoi, le "elle l'a bien cherché" est ancré profondément dans notre vocabulaire...

Je ne nie pas que ça puisse être le ressenti du coté de la victime, mais j'ai beaucoup de mal avec ça : je ne vois justement aucune nuance entre "Je me suis fait violée", "J'ai été violée" et "J'ai subi un viol".
Comme le soulignait Sopo, si on a un doute sur la connotation de chacune des phrases, en remplaçant "violer"/"viol" par "agresser"/"agression" on voit bien que la personne qui parle n'est pas l'auteur des faits.


Fixe : Core i5, 8GoRAM, NVidia 9800GT Silent => Ubuntu 22.04
Portable Compaq Presario2158 : AthlonXP-M2400+, 1GoRAM, ATI Radeon mobility320M => Primtux
https://launchpad.net/~julienmbpe

Hors ligne

#11 Le 30/11/2012, à 15:40

K4ede

Re : Viols, les voix du silence

Je suis pas vraiment d'accord avec toi Marie-Lou, enfin je pense que l'éducation n'explique qu'une petite partie. Je pense que ça vient plutôt du fait qu'on est "obligé" de laisser faire, on peut pas s'opposer au violeur (force physique, pression morale, membre de la famille...) et donc on fini par "consentir" dans le sens où l'on prend sur soi, "allez ce n'est qu'un mauvais moment à passer". Et donc à partir du moment où l'on a pas pu dire non, c'est comme si on disait oui, et donc, comme si on l'avait voulu, et donc que c'est de notre faute. Ce n'est donc pas vraiment une question d'éducation mais plutôt la nature intrinsèque du viol puisqu'à un moment ou un autre on a été "trop faible" pour dire non.
Ce qu'on pourrait faire contre ce sentiment de culpabilité ? À mon avis, libérer un maximum la parole et punir les vrais coupables. Si, lorsqu'on avoue, honteux, qu'on a été violé, la société fait tout ce qu'il faut pour punir le violeur sans harceler la victime, alors on comprend on fond de nous que c'est lui, le coupable, et on peut reprendre une vie plus ou moins normale. Si on continu d'accuser la victime, voir qu'on ne puni pas le coupable (comme dans le cas de la malheureuse Lucie, quel témoignage terrifiant), alors la victime se renferme encore plus sur elle-même. Ça permettra d'effacer la honte après coup mais il me semble que la victime d'un viol sera toujours honteuse sur le coup.

Sinon je ne vais pas relancer le débat sur le vocabulaire si ça a été fait dans un topic fermé roll (mais ça me démange big_smile )

Dernière modification par K4ede (Le 30/11/2012, à 15:41)

Hors ligne

#12 Le 30/11/2012, à 15:50

Julientroploin

Re : Viols, les voix du silence

Mais justement, le vocabulaire est important !
D'ailleurs :

K4ede a écrit :

Si, lorsqu'on avoue, honteux, qu'on a été violé, la société fait tout ce qu'il faut pour punir le violeur sans harceler la victime, alors on comprend on fond de nous que c'est lui, le coupable, et on peut reprendre une vie plus ou moins normale.

Ce qu'il faudrait justement c'est que les personnes qui confient qu'elles ont été violées arrêtent d'avoir l'impression d'avouer quelque chose de honteux. Comme je l'ai entendu récemment avec l'histoire de l’entraîneur de tennis : La honte doit changer de camps.


Fixe : Core i5, 8GoRAM, NVidia 9800GT Silent => Ubuntu 22.04
Portable Compaq Presario2158 : AthlonXP-M2400+, 1GoRAM, ATI Radeon mobility320M => Primtux
https://launchpad.net/~julienmbpe

Hors ligne

#13 Le 30/11/2012, à 15:55

K4ede

Re : Viols, les voix du silence

Bien sûr, mais comme je le disais j'ai l'impression que la honte est intrinsèquement lié au viol. J'espère que je me trompe ! Par contre, on peut surmonter la honte après avoir parlé et à ce moment la faire changer de camp.

Hors ligne

#14 Le 30/11/2012, à 16:03

Julientroploin

Re : Viols, les voix du silence

Le mécanisme qui pousse un enfant victime de viol (ou d'attouchements) par un adulte à se sentir coupable me semble plus facile à comprendre (on ne désobéit pas à un adulte) que celui qui pousse un adulte violé par un autre adulte...
Autant la solution au 1er cas me semble naturellement tenir à l'éducation et à la prévention : oui l'éducation à la sexualité est obligatoire dès le primaire ! http://www.education.gouv.fr/botexte/bo … 00322C.htm

Autant je ne vois pas d'autre  solution au 2e cas que ce qui se passe actuellement : une libération massive de la parole. Mais ça me parait tellement lent comme processus...


Fixe : Core i5, 8GoRAM, NVidia 9800GT Silent => Ubuntu 22.04
Portable Compaq Presario2158 : AthlonXP-M2400+, 1GoRAM, ATI Radeon mobility320M => Primtux
https://launchpad.net/~julienmbpe

Hors ligne

#15 Le 30/11/2012, à 16:15

ljere

Re : Viols, les voix du silence

Marie-Lou a écrit :

La question de la culpabilité me semble être totalement liée à la question politique (j'espère ne pas faire fermer le topic) de ce qu'est le viol, de ce qu'il charrie de représentations inhérentes à la sexualité, aux rôles sociaux de femmes et d'hommes, etc.
(Je parle donc ici spécifiquement des viols commis par des hommes envers des femmes)

j'ai un peu de mal à comprendre le pourquoi de la précision mise entre-parenthèse
d'ailleurs j'ai du mal tout court avec ce genre de sujet, mais je vais essayer de me forcer.

K4ede a écrit :

j'ai l'impression que la honte est intrinsèquement lié au viol

je ne pense pas qu'il s'agisse de honte mais plutôt d’écœurement de soi même, on a été abusé, notre corps est souillé, je ne pense pas que se soit de la honte mais bien un écœurement

Dernière modification par ljere (Le 30/11/2012, à 16:20)


ancien PC Toshiba satellite_c670d-11 / Linux Mint 21 Vanessa
Nouveau PC ASUS TUF GAMING A17 GPU RTX 4070 CPU AMD Ryzen 9 7940HS w/ Radeon 780M Graphics / Linux Mint 21.2 Victoria / Kernel: 6.4.8-1-liquorix / Desktop: Cinnamon

Hors ligne

#16 Le 30/11/2012, à 16:21

Julientroploin

Re : Viols, les voix du silence

ljere a écrit :
Marie-Lou a écrit :

ce qu'est le viol, de ce qu'il charrie de représentations inhérentes à la sexualité, aux rôles sociaux traditionnnellement attribués aux  femmes et aux hommes, etc.
(Je parle donc ici spécifiquement des viols commis par des hommes envers des femmes)

j'ai un peu de mal à comprendre le pourquoi de la précision mise entre-parenthèse
d'ailleurs j'ai du mal tout court avec ce genre de sujet, mais je vais essayer de me forcer.

Je pense que les modifications que j'ai mises en gras étaient sous-entendues et justifieraient la précision entre parenthèses.


Fixe : Core i5, 8GoRAM, NVidia 9800GT Silent => Ubuntu 22.04
Portable Compaq Presario2158 : AthlonXP-M2400+, 1GoRAM, ATI Radeon mobility320M => Primtux
https://launchpad.net/~julienmbpe

Hors ligne

#17 Le 30/11/2012, à 16:46

Marie-Lou

Re : Viols, les voix du silence

@K4ede

Nous sommes d'accord en fait. Quand tu écris : « Si, lorsqu'on avoue, honteux, qu'on a été violé, la société fait tout ce qu'il faut pour punir le violeur sans harceler la victime, alors on comprend on fond de nous que c'est lui, le coupable, et on peut reprendre une vie plus ou moins normale. », c'est précisément ce que j'appelle l'éducation (dans un sens très large, pas forcément l'enseignement à l'école primaire et au collège…)

Lorsque Lucie est confrontée à des flics qui agissent comme ils l'ont fait, c'est parce que ces derniers ne sont pas loin de l'idée selon laquelle « elle l'a bien cherché ». C'est pour changer ces représentations qu'il faut de « l'éducation ». Je me trompe peut-être, mais je pense que la honte dont tu parles est très largement amplifiée par le contexte dans lequel se déroulera « l'aveu » (rien que ce mot est terrible…).

Le glissement que tu évoques (je suis « obligé » de me laissé faire → je consentis/je prends sur moi → c'est comme si je disais oui → c'est ma faute) serait tout de même beaucoup plus difficile à suivre s'il était très clair, pour tout le monde (hommes, comme femmes) que rien ne justifie le viol et que le corps d'une femme n'appartient qu'à elle et à elle seule. Cette pente glissante que connaîtraient les victimes verrait tout de même sa funeste force amoindrie si les victimes n'évoluaient pas dans une société où elles sont elles-mêmes facilement soupçonnées de quelque chose.

ljere a écrit :

j'ai un peu de mal à comprendre le pourquoi de la précision mise entre-parenthèse

Julientroploin a répondu. Pour le dire rapidement, j'évoquais ici le viol comme instrument de domination des hommes sur les femmes (par exemple, comme outil de maîtrise de l'espace). Il me semblait donc sage de préciser que j'avais bien conscience que cela ne concerne pas tous les viols, d'où la parenthèse.


Compte clôturé

Hors ligne

#18 Le 30/11/2012, à 17:17

K4ede

Re : Viols, les voix du silence

@ Marie-Lou :
En effet. ce que je veux dire, c'est que malgré l'éducation, qui aiderait les victimes à se soigner après un viol, je crois qu'on ressentira toujours de la honte (ou de l’écœurement, j'avoue ne pas avoir bien saisi la nuance) lors d'un viol. C'est-à-dire qu'il y a deux hontes, celle pendant, et celle après (qui dépend du regard de la société, qui peut disparaître ou se transformer en colère comme pour Lucie). Grâce à mes parents, grâce au flic qui a pris ma déposition, et grâce au jugement, je n'ai plus honte de ce qui m'est arrivé.
Par contre, j'ai encore du mal à m'expliquer cette honte que j'avais au moment des faits, et qui m'a poussé à ne rien dire, jusqu'à ce que ma sœur "avoue". D'ailleurs, j'avais fait promettre à ma mère de n'en parler à personne, et je lui en ai voulu pendant un certain temps après. Et cette honte, je ne suis pas sûre que l'éducation puisse y faire grand chose, parce que je ne comprend pas vraiment d'où elle vient. Ma seule piste c'est ce sentiment de s'être laissé faire, mais je ne suis pas sûre que ce soit la seule réponse.

Hors ligne

#19 Le 30/11/2012, à 17:23

:!pakman

Re : Viols, les voix du silence

@K4ede : C'est une bonne initiative que d'avoir témoigné sur ce site (et comme tu dis, c'est impressionnant et terrible de voir autant de témoignages accumulés en si peu de temps).

Edit :
Un mec à écrit ça :
"Je suis bouleversé par les témoignages, et j'aimerais apporter mon soutien aux victimes. J'ai honte pour l'ensemble des hommes."

Je trouve la 1ere phrase super, mais la 2ème déplacée. J'aurais bien aimé lui répondre, savoir ce qu'il entendait par la...



Edit 2 :
Impressionnant de voir le nombre de viols commis par des membres de la famille.
Et les victimes qui ne sont pas crédibles aux yeux des autres membres de leur famille, voir exclues et mises à part.



Edit 3 :
Frédéric :
"Je suis un homme, oui un sale connard de mâle, en tous cas c'est ce que je ressens en lisant vos témoignages. Je n'arrive pas à comprendre ces chiffres, 75 000 viols déclarés, sans doute 10 fois plus en réél ... 750 000 viols par an ? Ma voisine de palier, ma boulangère, ma collègue de bureau, la petite fille que je croise dans la rue ... toutes victimes de ces salopards, victime de cette société aveugle et de cette (in)justice sourde. J'ai honte d'être un homme. Pardon"

wtf ? neutral

Dernière modification par :!pakman (Le 30/11/2012, à 18:34)


...

Hors ligne

#20 Le 30/11/2012, à 17:33

Marie-Lou

Re : Viols, les voix du silence

K4ede a écrit :

Et cette honte, je ne suis pas sûre que l'éducation puisse y faire grand chose, parce que je ne comprend pas vraiment d'où elle vient. Ma seule piste c'est ce sentiment de s'être laissé faire, mais je ne suis pas sûre que ce soit la seule réponse.

J'ai (enfin) retrouvé un truc que j'avais lu à ce sujet. C'est Cyrulnik, interrogé dans Sciences Humaines :

> D’où vient que la victime, d’une agression sexuelle par exemple, a souvent plus honte que son bourreau ?

> La plupart des femmes violées ont honte de le révéler. Car au moment où elle le dit, la victime sait qu’elle plante dans l’esprit de l’auditeur une représentation d’elle-même de femme souillée, battue, pénétrée, déchirée, donc une image dévalorisée. Si l’agresseur est extrafamilial, elle a moins honte : « C’est un salaud. » Avec un soutien familial, l’attribution de la faute est externe : « Si on me soutient, j’irai au commissariat et je me défendrai. » Alors que quand l’agresseur appartient au milieu familial, elle est victime de quelqu’un qu’elle aime (un oncle, un père…). Il est encore plus difficile de porter plainte. Et souvent, l’agresseur fait un cadeau. La fille violée pense alors : « Puisque j’ai accepté le cadeau, je me suis fait complice. » J’ai très souvent entendu en psychothérapie : « Sans le faire exprès, j’ai dû le provoquer. » Plus l’agresseur est proche, plus la défense est difficile. D’autant que sa famille peut refuser de croire la victime, qui, après avoir été agressée par le violeur, l’est ainsi par ses proches. Ou par sa culture : au Congo, les femmes violées sont répudiées, parce qu’elles portent la souillure sur plusieurs générations. Difficile alors de déclencher un processus de résilience. Elles se groupent parfois en communautés de femmes violées. C’est une exclusion sociale moindre que si elles voulaient rester dans leur famille.

Je trouve que son propos montre bien l'entremêlement du psychologique et du social. La situation des femmes violées au Congo doit bien être saisie comme étant ancrée dans une culture particulière. D'ailleurs, je me demande dans quelle mesure cela ne peut être considéré comme le miroir grossissant de notre propre société.


Compte clôturé

Hors ligne

#21 Le 30/11/2012, à 18:20

ljere

Re : Viols, les voix du silence

il est vrai que quand je dis écœurement il s'agit bien plus de mon ressenti à moi, moi je ne l'ai pas ressenti comme une honte
mais il faut aussi avouer que dans le rôle que l'on m'a fait jouer c'est moi qui jouais le rôle du violeur
c'est sûrement pour cela que je me suis dévalorisé pendant des années
sinon quand ma famille l'a su des années plus tard on m'a juste conseillé de laisser tomber,
chose que j'ai fini par faire quand j'ai su que mon agresseuse (tient ce mot n'existe pas) n'avait que reproduit les gestes que lui on infligeait


ancien PC Toshiba satellite_c670d-11 / Linux Mint 21 Vanessa
Nouveau PC ASUS TUF GAMING A17 GPU RTX 4070 CPU AMD Ryzen 9 7940HS w/ Radeon 780M Graphics / Linux Mint 21.2 Victoria / Kernel: 6.4.8-1-liquorix / Desktop: Cinnamon

Hors ligne

#22 Le 30/11/2012, à 18:36

K4ede

Re : Viols, les voix du silence

@ Marie-Lou :
C'est très intéressant ce dont tu parle. D'ailleurs, je retiens la phrase « Sans le faire exprès, j’ai dû le provoquer. ». C'est vraiment ce que j'ai ressenti, je m'en voulais d'avoir joué nue dans la piscine, du coup, c'était de ma faute ce qui m'arrivait. Une fois que ma famille m'ai aidée, j'ai surmonté ce sentiment, mais je ne comprend toujours pas d'où il vient à l'origine, et je ne suis pas sûre que ça vienne de mon éducation (que je considère comme relativement exemplaire quand aux relations homme-femmes).

@ Ijere :
Le viol des hommes est quelque chose de terrible, encore plus culpabilisé par la société. "Les hommes sont plus musclés, il aurait pu se défendre, et puis d'ailleurs avec quoi elle l'aurai violé, hein ? C'est sûrement lui qui retourne la situation...". Je ne peux que t'inviter à déposer ton témoignage sur la plateforme, bien qu'elle soit (malheureusement) destinée aux femmes.

Au passage, je m'insurge contre le délai de prescription. Alors quoi, après un certain temps, on est lavé de ses fautes ? Si un juriste pouvait m'expliquer un peu le pourquoi du comment, je lui en serais très reconnaissante. D'ailleurs, ce délai existe-t-il pour d'autres crimes ?

Edit : :!pakman, je n'avais pas vu tes édits. Tous les messages des hommes que j'ai lu vont dans ce sens, j'avoue que j'ai du mal à comprendre : pourquoi les hommes devraient avoir honte du comportement de quelques brutes ?

Dernière modification par K4ede (Le 30/11/2012, à 22:13)

Hors ligne

#23 Le 30/11/2012, à 21:56

Grünt

Re : Viols, les voix du silence

La culpabilité sur le moment ne vient-elle pas en partie de la culpabilité associée à tout ce qui est d'ordre sexuel ?


Red flashing lights. I bet they mean something.

Hors ligne

#24 Le 30/11/2012, à 22:18

K4ede

Re : Viols, les voix du silence

C'est tout à fait possible, oui, en tout cas ça rentre en jeu. Mais selon moi le tabou du sexe serait plutôt lié à la honte (on n'ose pas évoquer ce genre du sujet) plutôt qu'à la culpabilité de la victime, bien que les deux soient inextricablement liés.

Hors ligne

#25 Le 30/11/2012, à 23:56

Grünt

Re : Viols, les voix du silence

Tiens, j'oubliais :

Au passage, je m'insurge contre le délai de prescription. Alors quoi, après un certain temps, on est lavé de ses fautes ? Si un juriste pouvait m'expliquer un peu le pourquoi du comment, je lui en serais très reconnaissante. D'ailleurs, ce délai existe-t-il pour d'autres crimes ?

Oui, ce délai existe pour d'autres crimes. Il y a un délai de prescription variable selon la gravité de l'acte, en fait.  Ça peut se compter en mois pour des infractions peu graves.

La prescription est de 10 ans pour les crimes (meurtre et viol inclus, donc).
Dans le cas des viols sur mineurs, la prescription commence à partir de la majorité de la victime, donc jusqu'à ses 28 ans. Ça fait des viols sur mineurs les crimes ayant le délai de prescription le plus long (si on excepte les crimes contre l'humanité, imprescriptibles). Donc non, il n'y a pas de statut d'exception pour les viols : sur ce plan-là, la loi reconnaît leur gravité.

Dernière modification par Grünt (Le 30/11/2012, à 23:57)


Red flashing lights. I bet they mean something.

Hors ligne