#101 Le 12/12/2014, à 10:09
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
Robert Merle « La mort est mon métier » : un livre à lire, vraiment. Toute l'originalité c'est que l'auteur nous met dès son enfance dans les années 1910 dans la peau de celui qui sera beaucoup plus tard futur commandant en chef du camp d'Auschwitz. Je n'en ai pas sauté une page...
Et ce qui m'a frappé, c'est cette obsession continuelle d'obéir aveuglément aux ordres de son père d'abord, puis, plus tard, à ceux de ses supérieurs nazis. Avec le désir de toujours « bien faire », de « bien organiser », sans véritable méchanceté ni hystérie en fait, mais avec une absence totale de compassion et d'empathie pour ceux que sa hiérarchie a désignés comme "l'ennemi", un peu comme si ce personnage s'était mis en quelque sorte à la porte de lui-même et avait fonctionné de "A" jusqu'à "Z" en mode "machine".
Et les toutes dernières lignes sont à l'unisson (alors que la guerre est finie, qu'on l'arrête, qu'on vient de le juger et qu'il vient d'apprendre qu'il sera pendu à Auschwitz même...)
« Quelques instants plus tard, la porte de la cellule se refermait sur moi. Je m'assis sur mon lit, et j'essayai de réfléchir. Plusieurs minutes s'écoulèrent, je ne ressentais rien. Il me semblait que ma propre mort ne me concernait pas. »
Un livre glaçant et qui doit nous interroger sur nous-mêmes...
10/10 et merci à sounderk qui en avait conseillé la lecture.
Dernière modification par oleg (Le 12/12/2014, à 10:14)
#102 Le 02/01/2015, à 08:33
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
C'est l'histoire d'un vieux suédois acariâtre, toujours en colère contre les choses mal faites (selon lui), toujours en colère contre ses voisins qui ne savent pas planter un clou alors que lui est un excellent manuel, il n'aime pas les animaux, il déteste les chats, il n'aime pas les suédois qui utilisent des voitures allemandes au lieu de la marque nationale SAAB etc etc... Toujours en train de râler contre quelque chose ou quelqu'un parce qu'il ne comprend pas qu'on ne puisse être comme lui et faire les choses comme lui : c'est à dire toujours en « ligne droite », de manière rationnelle, pensée, pragmatique et « carrée ».
En plus, il a perdu sa femme bien aimée : tout son contraire, elle. Positive, enjouée, aimant les improvisations, les chats, aimant la vie. Comme quoi les contraires s'attirent. Il y a d'ailleurs une touchante description de leur rencontre et de la naissance improbable de leur amour dans le bouquin. Oui mais Ove vient de perdre sa Sonja bien aimée ! Alors Ove décide de se suicider. Mais à chaque tentative de suicide (un jour il essaie de se pendre mais la corde casse, un autre jour il essaie de s'asphyxier dans son garage mais la voisine vient lui demander un service, un autre jour il essaie de se jeter sous un train mais une personne tombe accidentellement sur la voie avant qu'il ait le temps de se lancer et c'est lui qui se porte à son secours et devient un héros pour les témoins présents de la scène etc etc !!!) et bien, donc, à chaque fois un événement imprévu surgit qui l'empêche de le faire. Non ce n'est pas du tout dramatique, c'est au contraire plein d'humour et c'est drôle tout le temps d'autant plus que c'est conçu par un de ces jeunes écrivains nordiques très surprenant.
Facile à lire, bon pour la détente et ne pas se prendre la tête (même si par moments on aimerait bie lui botter le cul à ce vieux con et lui donner la bonne corde pour se pendre ENFIN!) : 7/10
« Vieux, râleur et suicidaire, LA VIE SELON OVE » de l'écrivain suédois Frederik Backman.
http://www.pressesdelacite.com/site/vie … 03665.html
Bon, tout ça c'est bien joli mais maintenant, vais-je pouvoir m'attaquer au bouquin de Piketty ?
Je l'ai feuilleté récemment en librairie et j'avoue que c'est trop technique pour moi : aurai-je le courage seulement de le commencer et d'en venir ensuite à bout ? En plus, j'ai eu l'impression que l'auteur a le don de procéder à des analyses très compliquées qu'on pourrait en fait traduire en vérités et constats beaucoup plus simples.
#103 Le 02/01/2015, à 15:15
- sounderk
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
Ravis que ce Livre t'est beaucoup plus , Malheureusement je n'est plus du tous le Temps pour La Lecture .
Les occupations ont également changé et Le multimédia a Emporté beaucoup de chose,
Mais toutefois ce site et d'autre me font Lire et écrire ce qui est déjà énorme , et en plus améliore mon Orthographe en partie parce que des fautes j'en fais pas mal
Pour ton bouquin Suédois ça me fais penser a ce Film le méme genre D'humour a la Suédoise La Bande Annonce = http://www.allocine.fr/video/player_gen … 22590.html
Pour ce qui est de cet économiste qui Jongle avec les équation mathématique , je suis très Curieux de Voir comment Mettre en Application sa théorie de Taxé le Capital je cite ; D’ailleurs son Bouquin a de ce fait tous de suite été remis en question ect ... bien évidement dés qu'on touche au Grisbi ça rigole plus.
En tous les cas bonne et heureuse Année et surtout la Santé a Tous
Dernière modification par sounderk (Le 02/01/2015, à 15:23)
Hors ligne
#104 Le 12/01/2015, à 07:27
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
C'est plutôt le journal que je lis en ce moment et je relève ces extraits (suivis des liens donnant les articles entiers) . Désolé, je n'ai POUR LE MOMENT essentiellement de sources que d'écrivains et philosophes écrivant pour Libé mais ce serait intéressant d'en relayer émanant d'autres journaux, avec peut-être d'autres sons de cloches ?
« Philippe Lançon (journaliste à Libération et à Charlie Hebdo, grièvement blessé mercredi) parlait toujours des conférences de rédaction de Charlie comme de l’espace de parole le plus libre qui soit, celui où s’échangeaient les propos les plus drôles, les plus brillants, les plus subversifs, les plus détonants, au vrai sens du terme : Charlie n’était pas dans le ton, mièvre et convenu, parfois angéliste, des discours ambiants. Charlie faisait tache, comme le gros rouge, comme la merde - Charb n’a-t-il pas été mis en examen pour un étron fumant représentant Marine Le Pen, «la candidate qui vous ressemble» ? Oui, d’une certaine façon, nous avons laissé les journalistes de Charlie se coltiner seuls toute cette merde, le fondamentalisme, l’obscurantisme, le racisme - faisant parfois la fine bouche devant leurs outrances, ou leur reprochant de souffler sur la braise trop ardente des communautarismes et des clivages sociaux, voire d’alimenter l’islamophobie. Islamophobie, tu parles ! En France, l’islamophobie est le nom dont s’affuble le racisme, la bonne vieille haine anti-Arabes et anti-Noirs. La religion, dans cette histoire, n’est que l’alibi fumeux dont se pare la haine, des deux côtés. Du côté des fanatiques pseudo religieux comme du côté de ceux qui appellent au «choc des civilisations».
« Ils ont visé la tête » Emmanuelle Bayamack-Tam/ Ecrivaine/ Article entier = http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … te_1177310
« Ils sont entrés et ils tirent. Je les imagine en train de tirer. Parce qu’un écrivain, il fait ça, il imagine le réel quand il ne peut pas le voir ou quand ce réel dépasse son entendement. Depuis mercredi, je ne peux pas m’empêcher de penser à ce moment, celui où ils tirent, où ils ouvrent le feu. On me dit qu’ils n’ont pas eu d’hésitation, qu’ils étaient déterminés, qu’ils avaient tout prémédité, et moi, je pense qu’en effet, ils n’ont pas hésité, ne serait-ce qu’une fraction de seconde, parce qu’hésiter, cela aurait signifié qu’ils étaient encore du côté de l’humanité, qu’ils n’avaient pas tout à fait basculé dans le monstre, or il faut être du côté du monstre, pour faire cela, du côté de la non-humanité. »
« J'imagine parce que j'en ai besoin ». Philippe Besson Ecrivain / Article entier = http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … in_1177303
« Devant l’assassinat des journalistes de Charlie Hebdo, la prise de conscience de la liberté dont nous jouissons dans notre société, qu’expriment les manifestations spontanées des citoyens et la mobilisation de la presse, est spectaculaire. D’autant plus spectaculaire que nous avons tendance, d’ordinaire, à somnoler sur le coussin douillet que cette liberté nous procure. La mort des journalistes aura au moins servi, dit-on, à ce réveil de la conscience.
A nous maintenant de ne rien entamer, ne rien négocier de cette liberté. Dans les grands principes, les grandes causes politiques, c’est évident. Face à la tentation des petites lâchetés du train-train quotidien, c’est plus difficile. On peut descendre dans la rue, signer des pétitions, des manifestes, mais qu’en est-il de notre conduite individuelle ? Sait-on toujours bien résister à ces phénomènes pervers qui rongent notre liberté intérieure et qu’une personne de ma génération (20 ans en 68) voit avec désolation se développer de plus en plus ? Nous vivons dans une société où il y a bien moins de censure d’Etat qu’autrefois, infiniment moins que dans d’autres sociétés dans le monde, mais où l’autocensure en revanche, sous la pression d’un politico-sexo-écologiquement correct, gagne des circonvolutions de nos cerveaux. »
« Ne rien négocier ». Catherine Millet Ecrivaine/ Article entier = http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … er_1177312
« Un homme à la radio ce matin parlait de ça : du rire. Du fait que le rire ça grattait, ça agaçait, c’était terrible. Que ça se laissait pas attraper, qu’on pouvait pas y répondre, jamais savoir si c’était de la bidouille ou du bidon, et que pour ça c’était insupportable, ça les rendait fous les sérieux, les fachos, les fanatiques de l’ordre, les paniqués du brouillard, les allergiques au pas clair. Le rire ça flotte, disait l’homme à la radio, et il y en a qui supportent pas que ça flotte. »
« Ce que tu lui as mis, Bud ». Sylvain Prudhomme/ Ecrivain/ Article entier = http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … ud_1177313
« Les dessinateurs de Charlie Hebdo ont-ils été imprudents ? Oui, mais le mot a deux sens, plus ou moins aisément démêlables (et, bien sûr, il entre ici une part de subjectivité). Mépris du danger, goût du risque, héroïsme si l’on veut. Mais aussi indifférence envers les conséquences éventuellement désastreuses d’une saine provocation : en l’occurrence le sentiment d’humiliation de millions d’hommes déjà stigmatisés, qui les livre aux manipulations de fanatiques organisés. Je crois que Charb et ses camarades ont été imprudents dans les deux sens du terme. Aujourd’hui que cette imprudence leur a coûté la vie, révélant du même coup le danger mortel que court la liberté d’expression, je ne veux penser qu’au premier aspect. Mais pour demain et après-demain (car cette affaire ne sera pas d’un jour), je voudrais bien qu’on réfléchisse à la manière la plus intelligente de gérer le second et sa contradiction avec le premier. Ce ne sera pas nécessairement de la lâcheté. »
« Trois mots pour les morts et pour les vivants » Etienne Balibar/ Philosophe/ Article entier = http://www.liberation.fr/debats/2015/01 … ts_1177315
« Au lendemain de la tragédie, nous nous réveillons et voyons la réconciliation de notre peuple autour de ce qui lui est cher. Ce ne sont pas les réactions politiques, ni les unions nationales de façade, toujours fissurées au gré des ambitions, qui m’ont impressionné, mais la triste et tranquille assurance avec laquelle les Français ont fait face ensemble, dans le rassemblement spontané, sans haine, sans esprit de vengeance, sans peur.
(…)
L’islam n’est pas un problème, mais l’islam a un problème, la violence fondamentaliste, et nous serons aux côtés des pays musulmans pour qu’ils le surmontent et trouvent leur chemin de modernité et de paix. »
« L'insurrection des crayons »/ Dominique de Villepin Ancien Premier ministre/ Article entier = http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … ns_1177304
#105 Le 14/01/2015, à 10:22
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
« Qu’on cesse de se palucher à plaisir et bon compte avec le droit de rire de tout et la liberté d’expression. Ce n’est pas sur «ça» qu’on a tiré. C’est sur «nous». Ce qui, tout Charlie que nous prétendons être, n’a rien à voir.
Nous qui, depuis des années, faisons tout, jour après jour, pour pousser des Français arabes à la faute. Ou laissons faire ceux dont c’est l’objectif, l’obsession et le rêve de moins en moins secret.
Zemmour délire : ce ne sont pas jeunes mâles d’origine africaine qui émasculent l’ordre eurocentré. C’est tout l’inverse. Les stats sont là : c’est le jeune Reune ou Reubeu qui, hors exception athlétique ou show-bizeuze, subit une castration économique et sociale. Gâchis industriel et humain dont le testo-rap grosse beat à vantardise membrée constitue alors la dérisoire compensation.
Ce ne sont pas les dessins de Charlie qui sont insultants pour un Français arabe ou un musulman français et qui peuvent alors servir d’allumettes à un prédicateur pyromane. C’est, au quotidien, 24 heures sur 24, l’exclusion sournoise, la commisération larvée, le soupçon sous-entendu, l’émasculation euphémique, l’essentialisation tacite, la novlangue faux derche. »
« Nous avons payé mercredi » Laurent Chalumeau/ Ecrivain/ Article intégral = http://www.liberation.fr/culture/2015/0 … di_1178559
`
« Après les espoirs déçus du printemps arabe, la majorité du monde arabe se retrouve écrasée entre des tyrannies d’Etat ou du fanatisme religieux. Général Al-Sissi ou Etat islamique - le palindrome est là. Pourtant, un mouvement, encore marginal, mais croissant et significatif - particulièrement en Egypte et en Arabie Saoudite -, existe sur des sites internet créés pour ceux qui, écœurés par la violence jihadiste, rejettent l’islam politique ou l’islam lui-même. Ces apostats (Black Ducks, Freearabs.com, Arab Atheist Network) communiquent dans la peur et courent un grand risque, se détourner de leur religion pourrait entraîner pour eux de lourdes représailles. L’après-Charlie Hebdo doit ressusciter le débat sur la liberté d’expression. Malheureusement pour la pensée libre en Occident, l’attitude de l’islam modéré vis-à-vis de l’apostasie reste pour le moins brouillé. Une conversation civilisée sur la question doit naître »
« Des taches de lumière » Ian McEwan/ Ecrivain/ Article intégral = http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … re_1178558
#106 Le 16/01/2015, à 05:34
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
Ce mercredi 7 janvier 2015 , Sigolène Vinson, chroniqueuse judiciaire, était présente dans les locaux de « Charlie Hebdo » au moment de la tuerie. Elle a été épargnée in extremis par les deux frères Kouachi. Elle raconte dans Le Monde du 14/1/2015...
Extrait :
"Réfugiée derrière un muret
"Tandis que les balles sifflent dans la pièce, elle parvient à atteindre le bureau de Mustapha et Luce, puis se cache un peu plus loin derrière le muret qui marque la séparation avec celui des maquettistes. Laurent Léger, son voisin de table, est parvenu à se glisser sous le bureau du policier. Adossée au muret, la jeune femme aperçoit Jean-Luc, le maquettiste, qui s’est lui aussi réfugié sous son bureau. Elle entend la scène qu’elle ne voit pas : « Ce n’était pas des rafales. Ils tiraient balle après balle. Lentement. Personne n’a crié. Tout le monde a dû être pris de stupeur. »
Puis tout s’est tu. « Je connaissais l’expression “un silence de mort”… », dit-elle. Le silence, et cette « odeur de poudre ». Sigolène Vinson ne voit rien. Réfugiée derrière le muret, elle entend la mort, elle la sent. Puis elle perçoit des pas qui s’approchent. Elle les mime. Des coups de feu, à nouveau. « Je comprends que c’est Mustapha. » Puis elle voit. « J’ai vu les pieds de Mustapha au sol. » Les pas se rapprochent. Un des tireurs, « habillé comme un type du GIGN », contourne lentement le muret et la met en joue. Il porte une cagoule noire.
« Je l’ai regardé. Il avait de grands yeux noirs, un regard très doux. J’ai senti un moment de trouble chez lui, comme s’il cherchait mon nom. Mon cerveau fonctionnait très bien, je pensais vite. J’ai compris qu’il n’avait pas vu Jean-Luc, sous son bureau. » L’homme qu’elle regarde dans les yeux s’appelle Saïd Kouachi. Il lui dit : « N’aie pas peur. Calme-toi. Je ne te tuerai pas. Tu es une femme. On ne tue pas les femmes. Mais réfléchis à ce que tu fais. Ce que tu fais est mal. Je t’épargne, et puisque je t’épargne, tu liras le Coran. » Elle se souvient de chaque mot."
Le récit entier : http://www.lemonde.fr/societe/article/2 … _3224.html
Philippe Lançon, également chroniqueur à "Charlie Hebdo", se trouvait lui aussi dans la salle de rédaction au moment de la tuerie. Il a été blessé mais arrive à raconter, déjà.
Extrait :
"Chers amis de Charlie et Libération,
Il ne me reste pour l’instant que trois doigts émergeant des bandelettes, une mâchoire sous pansement et quelques minutes d’énergie au-delà desquelles mon ticket n’est plus valable pour vous dire toute mon affection et vous remercier de votre soutien et de votre amitié. Je voulais vous dire simplement ceci : s’il y a une chose que cet attentat m’a rappelée, sinon apprise, c’est bien pourquoi je pratique ce métier dans ces deux journaux – par esprit de liberté et par goût de la manifester, à travers l’information ou la caricature, en bonne compagnie, de toutes les façons possibles, même ratées, sans qu’il soit nécessaire de les juger.
J’y pensais dans la minute horriblement silencieuse qui a suivi le départ des tueurs aux jambes noires - je n’ai rien vu d’autres d’eux, allongé où je l’étais parmi mes compagnons morts, à moitié sous la table de la conférence de rédaction, tout au fond ; j’y pensais en regardant le corps le plus proche, celui de mon ami et ce jour-là voisin de tablée Bernard Maris, qui n’a jamais laissé ses fonctions limiter l’expression de ses enthousiasmes et de ses curiosités. Il venait de parler du roman de Michel Houellebecq, que nous aimons, et je l’avais engueulé…"
Son récit entier : http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … es_1180088
A propos de l'invention du slogan « Je suis Charlie » : comment est-il né ? Qui l'a crée ?
Réponse ici :
"Mercredi matin, la fusillade à Charlie Hebdo fige toute activité à la rédaction. Sidéré devant mon écran, je dois traduire la foule d’émotions qui m’ébranle. Meurtri par le fait d’appartenir à un monde où il est possible d’assassiner des hommes pour avoir fait des dessins, j’appose «Je suis» à «Charlie». Et l’image «Je suis Charlie» est née. Elle est synonyme de «Je suis libre» et de «Je n’ai pas peur»."
Récit entier de Joachim Roncin : http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … ie_1180024
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 16/01/2015, à 06:06)
#107 Le 16/01/2015, à 06:05
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
Après les récits, quelques nouvelles réflexions, analyses et tentatives de recul sur le même sujet .
« Que reste-t-il de la liberté d'offenser ? » par Ruwen Ogien, philosophe et directeur de recherche au CNRS
Extrait :
« Parmi les justifications les plus fortes du principe de la liberté d’expression, il me semble que la plus convaincante reste celle de John Stuart Mill. Elle implique qu’il faut distinguer aussi clairement que possible les offenses et les préjudices.
Les offenses sont des actes qui provoquent des émotions négatives, comme le dégoût ou la colère, mais pas de dommages physiques concrets à des individus particuliers. Il peut s’agir de représentations écrites ou visuelles qui causent au pire des crimes imaginaires ou des crimes sans victimes, c’est-à-dire des réactions de répulsion qui visent des actes dans lesquels on ne peut pas identifier une victime au sens concret du mot.
Ainsi, les anges et les dieux ne font pas partie de la classe des êtres qui pourraient être littéralement des victimes et toute atteinte à leur égard est une offense et non un préjudice.
Parlant de ce genre d’offense, Mill citait Tacite : «Les offenses commises vis-à-vis des dieux sont l’affaire des dieux.» Il ajoutait ironiquement : «Il reste à prouver que la société ou l’un de ses fonctionnaires a reçu d’en haut le mandat de venger toute offense supposée au Tout-Puissant qui ne constitue pas également un tort infligé à nos semblables. (1)»
De leur côté, les préjudices sont des actes qui causent ou peuvent causer des dommages concrets graves et évidents à des individus particuliers. Dans le domaine de la liberté d’expression, on peut parler de préjudices à propos de la diffusion de rumeurs infondées qui portent atteinte à la réputation d’une personne. On pourrait dire aussi que les discours de haine qui appellent clairement à la persécution, la déportation ou l’élimination physique d’une personne ou d’une population spécifique sont des préjudices et pas seulement des offenses. »
Article entier :
http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … er_1179934
Auteur de travaux sur la violence, la prison et l'humour, le psychanalyste Jacques André se penche sur l'immense élan collectif qui a suivi les attaques tétanisantes de la semaine dernière.
Interview intitulé « Dieu, c'est un autre nom pour le surmoi ».
Extrait :
« - Qu’est-ce qu’un psychanalyste peut dire de ce qui s’est passé la semaine dernière ?
- La position du psychanalyste est tellement mêlée à celle du citoyen… Pour ma part, je n’ai jamais connu de moment comme ça, où la vie psychique collective est à ce point prévalente. Et pas juste parce qu’il devient quasi incorrect d’évoquer sa vie personnelle au regard de l’immensité de ce qui se passe.
Je pourrais parler de ce qui se passe pour moi. Je ne me sens plus seulement le fils d’une histoire familiale, d’une filiation parentale, comme tout le monde, mais aussi le fils d’une culture, d’une philosophie, d’un esprit, d’une nation même. Moi qui ai horreur du nationalisme, c’est comme si ce mot reprenait un sens. Le mot «peuple» aussi, qu’on manie habituellement à tort et à travers, comme si cet être psychique collectif acquérait pour une fois une cohérence.
Il faut un événement comme celui-là pour s’apercevoir que cette histoire - et pas juste l’histoire de France, on voit bien que c’est l’histoire des idées, de la démocratie - est inscrite, et transmise. Ce qu’on n’a pratiquement aucun moyen de repérer dans d’autres circonstances. Bon, Charlie Hebdo, ce n’est pas Voltaire mais, en même temps, il y a quelque chose qui passe par le boulevard Voltaire, de la République à la Nation. C’est très étonnant de découvrir à quel point nous sommes habités par ça, à notre insu. »
Interview complet : http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … oi_1180025
« Lois antiblasphème pour mieux persécuter » par Joëlle Fiss, Consultante, spécialiste des droits de l'Homme
Extrait :
« Pourquoi le blasphème est légal si l’incitation à la haine raciale, ou religieuse, est interdite ? Parmi les arguments d’une grande partie de l’opinion publique dans le monde musulman (et non seulement les islamistes), les caricatures de Charlie Hebdo blessent au cœur de leur identité. Certains vont jusqu’à soutenir des lois antiblasphème, qui visent à criminaliser toute insulte contre la religion ou les symboles religieux, au nom de l’antiracisme. Le droit français interdit certains discours dans l’espace public. Ainsi, l’incitation à la haine raciale, ou religieuse, constitue une infraction pénale en France et peut déclencher des sanctions. Il faut donc faire la distinction entre les lois antiblasphème et les lois contre l’incitation à la haine. »
Suite de la réflexion : http://www.liberation.fr/monde/2015/01/ … er_1179929
"Mahomet, une image très sensible" par Bernadette Sauvaget
"- Pourquoi la figure de Mahomet provoque-t-elle de si fortes polémiques ?
- C’est une des figures sacrées de l’islam, presque l’équivalent du Christ, pointe le chercheur et psychanalyste Fethi Benslama. Pourtant, ce n’était pas le cas dans les premiers siècles de l’islam.» Pour l’historienne Jacqueline Chabbi, spécialiste des origines de l’islam, la figure du Prophète a de fait évolué. «Nous n’avons que très peu d’éléments historiques sur lui, explique-t-elle. Mais, dans le Coran, c’est un homme comme les autres, essuyant même des caricatures en parole. Ses adversaires le traitent ainsi de "châtré" car il n’a pas de fils survivant.» Selon l’historienne, c’est au IXe siècle, au moment où de nombreux chrétiens et juifs se convertissent à l’islam que la figure de Mahomet est, d’une certaine façon, «sacralisée», devenant un modèle pour ces nouveaux musulmans. Né au XVIIIe siècle en Arabie Saoudite, le wahhabisme, matrice des fondamentalismes en islam, met très fort l’accent sur cette figure «sacralisée» du Prophète."
Article entier : http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … le_1180090
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 16/01/2015, à 06:13)
#108 Le 17/01/2015, à 07:37
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
"Aujourd'hui, le Prophète est aussi "Charlie" " par Soufiane Zitouni Professeur de philosophie au lycée Averroès à Lille.
Extraits :
"Voici une tradition prophétique islamique (hadith) que j’aime raconter à mes élèves de terminale : un jour, un compagnon du prophète Mohamed surprend celui-ci en train de pleurer, et lui demande la raison de ces larmes qui lui fendent le cœur. Le Prophète lui répond alors entre deux sanglots : «J’ai vu que dans le futur j’allais devoir témoigner contre ma propre communauté.» Et je pose ensuite cette question à mes élèves : «Ce futur sur lequel pleurait le Prophète de l’islam, n’est-ce pas notre propre époque ?
(...)
J’ai raconté ce hadith mardi à une classe de terminale dans laquelle les élèves sont majoritairement musulmans, et où il y a des filles voilées et d’autres non voilées. Je leur ai raconté cette histoire en ayant à l’esprit la une du Charlie Hebdo, renaissant de ses cendres, révélée par les médias la veille de sa sortie, mais aussi un dessin de Cabu tellement juste et si peu compris par beaucoup de musulmans, malheureusement, montrant un prophète de l’islam en colère s’exclamant : «C’est dur d’être aimé par des cons !» J’atteste ici en tant que citoyen français de culture musulmane de l’authenticité de ce hadith relayé par Cabu, paix à son âme !
(...)
Pourquoi tant de musulmans manquent aussi cruellement d’humour, de recul, de sérénité dès que l’on touche à un tabou, un dogme, un interdit auquel ils sont jalousement attachés ? Prenons l’exemple de l’interdiction de la représentation du Prophète. Un sacré tabou au sein de l’islam ! Mais un tabou indéboulonnable vraiment ? J’ai été très proche un temps d’une confrérie soufie, la Tariqa Alawiya, dont le guide spirituel vivant en France est le cheikh Khaled Bentounès. En 2009, à l’occasion du centenaire de cette confrérie, le cheikh Bentounès a édité un bel album, d’une grande richesse iconographique, dans lequel il a osé publier des miniatures persanes représentant le prophète Mohamed, en considérant sereinement que ces représentations faisaient partie du patrimoine de l’islam, et qu’il n’y avait pas toujours eu, dans l’histoire de cette religion, un consensus des savants musulmans quant à l’interdiction de ce type de représentation. Comme il fallait s’y attendre, une polémique violente a immédiatement éclaté dans la presse algérienne, provoquée par deux institutions islamiques de poids, le Haut Conseil islamique et l’Association des oulémas, celle-là même qui combattit avec acharnement les confréries soufies du temps de la colonisation française en les accusant de superstitions non conformes à la charia et d’accointances coupables avec l’envahisseur. Ces mêmes institutions islamiques ont aussi accusé le cheikh Bentounès d’avoir associé dans son album commémoratif le sceau de l’émir Abdelkader à l’étoile de David, symbole du sionisme selon eux, alors qu’il ne faisait que reprendre le symbolisme profond et commun à l’islam et au judaïsme du sceau de Salomon. Mais l’ignorance de ces prétendus «savants» de l’islam (ouléma veut dire «savant» en arabe) nous aura permis au moins de découvrir avec enchantement dans la même presse algérienne, et cela grâce à la pugnacité du cheikh Bentounès, que nombre d’édifices musulmans en Algérie recèlent dans leur architecture ou leur mobilier ce «symbole du sionisme». Est-ce à dire, alors, que la connaissance serait sœur de l’humour ? A cette question, je réponds sans hésitation, oui ! Ils sont risibles ces pseudo-savants de l’islam qui connaissent si mal leur religion et son patrimoine universel ! Mais ils sont risibles tant qu’ils ne passent pas au stade de la kalachnikov ou de l’attentat dit «kamikaze» pour répondre à ceux qu’ils perçoivent comme des ennemis de l’islam. Rappelons-nous que le prophète Mohamed lui-même disait que «l’encre du savant est plus précieuse que le sang du martyr».
Article entier : http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … ie_1180802
#109 Le 18/01/2015, à 17:32
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
"MERCREDI 7 JANVIER 2015 : NOTRE 11 SEPTEMBRE" par Michel Onfray (écrivain/philosophe)
"- Il est 11h50 ce mercredi 7 janvier 2015 quand arrive sur l’écran de mon portable cette information qu’une fusillade a lieu dans les locaux de Charlie-Hebdo. Je n’en sais pas plus, mais que des tirs nourris aient lieu dans la rédaction d’un journal est de toute façon une catastrophe annoncée. Au fur et à mesure, j’apprends avec consternation l’étendue des dégâts ! Cabu, Charb, Wolinski, Tignous, Bernard Maris… On annonce dix morts, deux policiers, des blessés en nombre, « une boucherie » est-il dit… A 12h50, j’ai tweeté « Mercredi 7 janvier 2015 : notre 11 septembre », car je crois en effet qu’il y aura un avant et un après. Les choses ne font que commencer."
Totalité de l'article paru dans "Le Point" du 10/1/2015 : http://mo.michelonfray.fr/non-classe/li … vier-2015/
#110 Le 21/01/2015, à 16:22
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
"CHARLIE : ETHIQUE DE CONVICTION CONTRE ETHIQUE DE RESPONSABILITE" par Didier Fassin, professeur de Sciences Sociales à l'Institute for Advanced Study de Princeton
Extrait :
"Le sociologue allemand Max Weber peut nous aider sur ce plan. Dans une conférence fameuse sur la politique, il écrit que «toute activité orientée selon l’éthique peut être subordonnée à deux maximes totalement différentes et irréductiblement opposées». D’un côté, «l’éthique de conviction» repose sur le principe kantien du devoir : il faut agir en fonction de principes supérieurs auxquels on croit. De l’autre, «l’éthique de responsabilité» relève de la philosophie conséquentialiste : il faut agir en fonction des effets concrets que l’on peut raisonnablement prévoir. Bien sûr, précise le sociologue, «cela ne veut pas dire que l’éthique de conviction est identique à l’absence de responsabilité et l’éthique de responsabilité à l’absence de conviction.» Néanmoins, face à une décision politique engageant des choix éthiques, l’une ou l’autre de ces positions prévaut : «Lorsque les conséquences d’un acte fait par pure conviction sont fâcheuses, le partisan de cette éthique n’attribuera pas la responsabilité à l’agent, mais au monde, à la sottise des hommes ou à la volonté de Dieu qui a créé les hommes ainsi. Au contraire, le partisan de l’éthique de responsabilité comptera justement avec les défaillances communes de l’homme et il estimera ne pas pouvoir se décharger sur les autres des conséquences de sa propre action pour autant qu’il aura pu les prévoir.» Homme de conviction, Max Weber penche cependant vers l’éthique de responsabilité."
Article entier : http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … te_1184055
#111 Le 21/01/2015, à 17:31
- Ar vuoc'h
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
" L’ironique paradoxe serait est en effet que ceux qui défendent la liberté d’expression radicalisent leur position au point de n’être plus en mesure d’accepter que s’expriment d’autres opinions que la leur."
Fixed.
Pris d'une soudaine passion pour le roman-photo, un art encore peu connu mais enclin à devenir en vogue.
Dans une société fondée sur le pouvoir de l'argent, tandis que quelques poignées de riches ne savent être que des parasites, il ne peut y avoir de "liberté", réelle et véritable. Vladimir Ilitch Oulianov
Je suis Ali Dawabcheh, agé de 18 mois brûlé vif le 31 juillet 2015.
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#112 Le 22/01/2015, à 08:16
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
"Quelle laïcité à l'égard de l'islam ?" par Jean-Marc Lévy-Leblond, physicien et essayiste
Début de l'article :
"Certaines voix ont récemment imputé aux journalistes de Charlie Hebdo une attitude «imprudente» dans leur traitement de l’islam. Mais la verve de Charlie Hebdo s’est exercée contre toutes les religions, sans en épargner aucune. Soit on estime qu’ils ont été imprudents ou provocateurs aussi par rapport au christianisme et au judaïsme, soit on leur accorde la même liberté à l’égard de l’islam. La première posture est sans doute défendable, et alors il faut l’expliciter et l’argumenter. Mais demander plus de «prudence» spécialement à l’égard de l’islam relève d’une dangereuse singularisation et équivaut à considérer que ce n’est pas une religion «comme les nôtres», ce qui est exactement la position de ceux qui stigmatisent l’islam en tant que tel - même si c’est parfois avec de bonnes intentions (de la «stigmatisation positive» ?)"
Suite de l'article entier : http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … am_1184048
"La vieille Europe et son théâtre d'ombres" par Raphaël Liogier, sociologue et philosophe
Extrait :
"Alors, pourquoi ces meurtriers fous furieux crient-ils au ciel, en appellent à Allah, à Mohammed, à Al-Qaeda ? Est-ce parce qu’ils feraient partie de la «communauté» de certains musulmans qui se seraient progressivement radicalisés ?
Disons le tout net : ce n’est pas le profil des jihadistes actuels. Dans les années 90, et jusqu’au début 2000, nous avions effectivement des personnalités théologiquement radicalisées, avec une éducation religieuse (et souvent un cursus universitaire), correspondant aux individus qui sont à l’origine des attentats du 11 septembre 2001. Aujourd’hui, c’est très différent, nous avons des jeunes frustrés, qui finissent par prendre au sérieux la mise en scène collective qui leur assigne le rôle du jihadiste dont on a si peur. Ce rôle, monstrueux pour «nous», devient désirable pour «eux», justement parce qu’il est monstrueux pour nous. Leur folie se nourrit du sentiment de l’humiliation, du ressentiment et du désir de vengeance et d’héroïsme. Ils s’improvisent soudain jihadistes, non pas progressivement, mais soudainement, j’y tiens."
Article entier : http://www.liberation.fr/societe/2015/0 … es_1184050
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 22/01/2015, à 08:21)
#113 Le 22/01/2015, à 17:38
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
« Avis à mon exécuteur » de Romain Slocombe.
Voici le personnage central du livre auquel Romain Slocombe redonne vie dans un récit-fiction passionnant : http://fr.wikipedia.org/wiki/Walter_Krivitsky
Et avec ce roman nous avons droit en quelque sorte à « un livre dans le livre »...
2012 : un passant retrouve, en Suisse dans les poubelles d'un vieil homme originaire d'Europe centrale, mort d'une crise cardiaque, de vieux livres et une grosse liasse de documents dactylographiés pour la plupart et souvent en russe : ...le manuscrit d'un livre : "le Grand Mensonge" - les crimes secrets de Staline en Russie, en France et en Espagne, et ma rupture avec le parti bolchevik et le communisme par Victor Krebnitsky ancien agent du renseignement soviétique en Europe".
Romain Slocombe nous dévoile ce livre : alors fiction, récit autobiographique ou livre d'espionnage ou d'histoire... ?
Les « mémoires » du général russe Victor Krebnitsky ancien agent du renseignement soviétique, nous en apprennent beaucoup sur le régime soviétique, la vie de ses agents à Moscou et dans le monde, la paranoïa du régime et de Staline, les épurations pour cause de complots supposé, les mots ou écrits qui peuvent vous faire exécuter d'une balle dans la nuque, les machinations policières et judiciaires, la méfiance généralisée : l'ami de toujours pouvant être celui qui vous tuera...
Mais le livre "le Grand Mensonge" nous dévoile également des secrets d'histoire, cachés : Lénine empoisonné par Staline, Staline faisant le jeu d'Hitler en exécutant les réfugiés antinazi, Staline volant l'or des espagnols pendant la guerre civile, un régime stalinien qui "donne aux services secrets russes à l'étranger la mainmise sur le recrutement des volontaires internationaux qui affluaient pour défendre la République contre le fascisme.....la possibilité d'une révolution "trotskiste" en Espagne représentait pour Staline le pire des cauchemars", et donc exécutant des volontaires trotskistes. Et surtout : Staline malade à l'idée qu'on puisse détenir une preuve (possible ) de son passé d'agent provocateur tsariste (possible) dans l'Okhrana (et éliminant impitoyablement tous les détenteurs de ce secret d'état pour cette raison.
Quand on termine ce polar vraiment époustouflant, on regarde s'il n'y a pas un agent du NKVD planqué sous son lit, des micros cachés dans sa chambre et 2 mecs bizarres en imperméables bleus qui vous guettent dans la rue pour vous faire la peau, tôt ou tard, vous le communiste fidèle au Petit Père des Peuples paranoïaque qui aurait fait assassiner son ombre si cela avait été possible.
Seul reproche : trop de personnages qui défilent, trop de noms propres auxquels il faut en plus ajouter les pseudos de couverture...On s'y perd un peu. Mais c'est vraiment prenant ! 8/10
#114 Le 30/01/2015, à 17:23
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
« Lennon » de David Foenkinos (Collection J'ai Lu/ 5.70 €)
Pour moi qui suis un inconditionnel des Beatles et un grand admirateur de John, je me régale, je dévore, je suis complètement « in ».
C'est une sorte d'autobiographie fictive mais on y est vraiment : c'est vraiment John qu'on croit entendre, c'est vraiment lui que l'on reconnaît dans sa souffrance, dans sa violence, dans son cynisme, dans ses attentes, dans sa façon de parler au ras des pâquerettes...
Car question style, oui, c'est torché à l'emporte-pièce, mais vraiment facile et tellement prenant à lire.
Moi qui croyais tout connaître sur ce sale type (car il ne s'épargne pas dans une constante lucidité!), j'ai appris deux ou trois choses que j'ignorais (et confirmées sous forme de notes attestant de leur authenticité) tout cela en dehors de la partie fiction qui est, en fait, elle aussi basée sur de nombreux faits réels que tout le monde connaît déjà (comme par exemple, la manière lâche dont le groupe s'est séparé de Pete Best -leur premier batteur-, comme la raclée ultra violente que John infligea au disc-jokey Bob Wooler et qu'il avait failli tuer ce jour-là parce que ce dernier s'était moqué de son homosexualité latente et un peu refoulée dans son rapport à leur imprésario Brian Epstein etc etc )
Ce type n'arrête pas de raconter sa souffrance, ses ratages, l'impossible vécu de sa célébrité qui ne va faire qu'accentuer le fait qu'il sera toujours à côté des ses pompes, avec des racines de malheur forgées dès l'enfance à cause de l'abandon de ses parents complètement irresponsables et auprès desquels il aura toujours quémandé beaucoup plus d'affection qu'il n'en aura reçu. Schéma terrible qu'il reproduira lui-même sur sa première femme Cynthia et son premier enfant Julian complètement délaissés et humiliés avant qu'il ne trouve enfin la femme de sa vie (Yoko, que je n'ai jamais pu piffer entre parenthèses car elle a complètement castré cette grande gueule toujours à la recherche d'une maman de substitution), avant qu'il ne s 'occupe enfin en vrai père responsable de son second fils Sean, avant qu'il se retire un peu des lumières et qu'il fabrique lui-même son propre pain quotidien dans son refuge pour milliardaire du Dakota à New-York et... que son génie musical ne s'éteigne peu à peu dans un bonheur baba cool. Oui mais : avant aussi qu'un connard déséquilibré ne le troue définitivement de plusieurs balles dans la peau en achevant cruellement l'odyssée.
Pour moi, deux de ses plus belles chansons : In My Life et Across The Universe et tant d'autres aussi...
Et comme le dit l'auteur dans sa préface :"Sa musique m'accompagne tout le temps, je l'admire d'une manière infinie. Je sais qu'il est dans ma vie"...
10/10 (mais je ne suis pas objectif, bien sûr, c'est un fan qui lit ….)
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 30/01/2015, à 17:33)
#115 Le 18/02/2015, à 08:19
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
« La transe des insoumis » de Malika Mokkedem.
« La transe des insoumis » c'est un mal (ou un « plus »?) dont l'auteure souffre depuis sa plus tendre enfance, quand elle étouffait sous une couverture rêche, pleine de remugles et d'odeurs de pisse, dans la couche partagée avec ses parents nomades, avec ses frères et sœurs dans leur ksar perdu du sud algérien où le père était gardien d'un puits en plein désert, près de Béchar. Ce "mal" : celui de se sentir privée de son propre sommeil en se sentant condamnée à veiller celui de ses proches : l'insomnie quoi. Et de tenter de combattre l'insomnie en s'évadant par la lecture de tous les livres possibles qui forgent son imaginaire et son envie de fuir sa famille, sa communauté, son environnement géographique. Toutes choses qu'elle va payer cher, très cher – en insultes, réprimandes, ostracisation, jusqu'aux menaces de mort constantes- à partir du moment, où, contre l'avis de ses parents elle décide de pousser ses études au-delà de l'école primaire et de refuser un mariage imposé par les siens sur place. Le livre nous fait partager tout l'itinéraire qui amène Malika à quitter ensuite l'Algérie pour entreprendre en France des études de médecine, à choisir de devenir néphrologue dans un quartier d'immigrés à Montpellier, puis à épouser un français (le crime absolu pour sa famille avec laquelle tous les ponts sont de toute façon coupés depuis longtemps...) La « transe des insoumis » c'est clairement la propre histoire de l'auteure, l'histoire de quelqu'un qui décide de quitter sa communauté (donc la sécurité, la reconnaissance et le respect) pour devenir un individu libre et rebelle (suscitant donc la haine, le rejet et le reniement des siens) : un sacré caractère que cette écrivaine, une sacrée volonté, une sacrée personnalité et une sacrée écriture aussi, car je trouve que c'est fort bien écrit. Une seule réserve quand même : à mon avis, l'auteure la ramène un peu trop, parfois, avec son ego d'écrivain et se séances de signatures et évoque un peu trop souvent ses autres œuvres tout au long de son récit (quoique cela me donne aussi envie justement de les découvrir car je ne la connaissais pas ... à voir éventuellement donc (?) : "Le siècle des sauterelles", "L'interdite", "Des rêves et des assassins", "Les hommes qui marchent", "La nuit de la lézarde" (?)...) En attendant, moi, pour celui-ci c'est quand même = 8/10
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 18/02/2015, à 08:27)
#116 Le 19/02/2015, à 01:51
- Elsimate
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
J'aimerais commencer à lire la compagnie des glaces, mais je trouve aucun intégrale.
Tout ce que je trouve, c'est que les premiers livres, et en plus la plupart du temps sous formes d'e-book pour leur kindle plein de DRMs (beurk).
Dommage : *lien supprimé par la modération*
J'ai plus de 500 .epub sur une tablette Kobo Arc, pas une liseuse... j'aime beaucoup, j'ai totalement délaisser le format papier.
Je lis présentement "N'oublier Jamais" de Michel Bussi que je découvre, je me régale...
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/41148
Bye !
Modération: Merci de respecter les règles « L'incitation ou la proposition à l'échange de données ou d'informations enfreignant la législation en vigueur sont prohibées. Les liens vers des sites proposant ou facilitant ce genre d'échange seront supprimés. »
Dernière modification par grim7reaper (Le 19/02/2015, à 08:12)
- La loi est faite pour être appliquée avec jugement, y a que ceux qui en sont dépourvu qui l’applique à la lettre -
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#117 Le 19/02/2015, à 17:47
- Elsimate
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
Bonjour,
Tout d'abord milles excuses pour le lien hors normes, j'en prends note.
Pour amateur de polars comme moi, 5 suggestions que je juge incontournables:
1) "658" de John Verdon
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/27780
2) "Seul le silence" de R.J.Ellory
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/18804
3) "Juste une ombre" de Karin Giebel
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/30690
4) "Vertige" de Franck Thilliez
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/28604
5) "Un fille comme les autres" de Jack Ketchum
http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/18581
J'arrête là mes suggestions bien que plein d'autres me viennent en têtes.
@+ Elsimate
Dernière modification par Elsimate (Le 20/02/2015, à 01:25)
- La loi est faite pour être appliquée avec jugement, y a que ceux qui en sont dépourvu qui l’applique à la lettre -
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#118 Le 02/03/2015, à 09:19
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
3 dernières lectures :
1) « La nuit nous a surpris » de Kien Nguyen.
Un récit très classique d'écriture mais bien fichu et qui accroche. Le jeune Kien raconte dans un Vietnam en guerre son enfance placée sous une double malédiction au moment où les communistes libèrent Saïgon : d'une part il est né d'une relation « coupable » de sa mère avec un soldat US, il est donc considéré comme un « sale métis », « un sale amérasien » et d'autre part ses parents appartenaient à une famille aisée vivant dans une luxueuse villa dans le sud capitaliste. A partir du 30 avril 1975, au moment où les troupes vietcong pénètrent dans Saigon, commence alors pour sa famille une lente et impitoyable descente aux enfers : ce sont les anciens domestiques qui s'emparent de leur villa et qui traitent leurs anciens patrons en esclaves. Les rapports entre les personnages (amis ou ennemis) sont très durs dans ce récit très noir, vraiment on est dans un tunnel tout au long de ce livre. Avec quand même un peu de lumière à la fin, si vous êtes patients !
A présent, vous en avez ras-le-bol de vous sentir responsables de tous les maux de la Terre ? Ras-le-bol de "la haine de soi occidentale". Alors lisez :
2) « Le sanglot de l'homme blanc – Tiers-Monde, culpabilité, haine de soi » un essai des années 80 de Pascal Bruckner.
Démonstration unilatérale et richement étayée de ce philosophe essayiste que je résume : l'homme occidental porte le pêché originel de toutes les fautes commises par lui-même ou ses prédécesseurs (du génocide indien en passant par les guerres d'Algérie et du Viet-Nam etc etc etc …) et entretient savamment une haine de soi qu'il met en parallèle avec une idéalisation du « Tiers-Monde » au service duquel il prétend se mettre par sa culpabilité et sa volonté de rachat permanents. Selon l'auteur, en suivant ce schéma, l'intelligentsia occidentale retomberait dans l'ethnocentrisme en croyant s'en détacher et s'aveuglerait en ne pouvant admettre que le « Tiers-Monde » est lui aussi, quelque part, loin d'être un Eden et largement responsable de ce qu'il était et de ce qu'il est devenu (ce que l'auteur démontre très mal à mon avis : c'est pourquoi je suis allé jusqu 'au bout de cette démonstration en croyant à chaque fois que l'auteur allait enfin aborder à fond cet aspect-là). En fait, il termine avec l'expression d'une forme de supériorité de notre monde sur un point précis :
« S'il est une leçon que l'Europe peut enseigner aux autres, c'est la remise en question d'elle-même, qu'elle a pratiquée de façon systématique. Elle seule a risqué son identité en unifiant ses cultures par l'angoisse et le doute, offrant l'exemple unique d'une mosaïque d'ethnies et de sociétés qui ont su prospérer par l'interrogation, la menace constante de leur anéantissement. (….) Cette petite presqu'île à la pointe de l'Asie est la seule civilisation dans l'Histoire à avoir su « penser » ses crimes. »
3) « L'innovation destructrice », un opus très récent celui-là (2014) de Luc Ferry.
Je trouve que c'est confus, écrit de manière bâclée, juste pour aller faire le beau sur les plateaux télé. En gros c'est : « vive le capitalisme qui détruit en créant sans cesse du nouveau ! » Et lui aussi croit à la supériorité de l'Europe quand il termine par ceci :
« Je tiens à certains égards la civilisation européenne pour supérieure à toutes les autres, non par européocentrisme, mais parce qu'elle est la seule, comme le disait Kant en 1784, dans « Qu'est-ce que les Lumières », qui ait permis aux citoyens de sortir de l'enfance, d'accéder à l'âge adulte. Dans les théocraties qui ensanglantent aujourd'hui le monde, comme ce fut encore le cas dans les dictatures totalitaires, les individus sont traités comme des mineurs. »
Nous voilà donc rassurés !
Pascal Bruckner et Luc Ferry : voilà au moins deux écrivains de droite complètement décomplexés.
#119 Le 04/03/2015, à 08:16
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
En plein dans « Le Royaume » d'Emmanuel Carrère en ce moment.
Pour quelqu'un comme moi que la lecture directe de la Bible et de livres sur l'histoire des religions rebute un peu, je trouve cet ouvrage tout simplement passionnant.
L'auteur, à sa façon (et de manière souvent cabotine, c'est un gros malin et un sacré « passeur »!) , nous fait revivre la naissance du christianisme à travers l'odyssée de l'illuminé Paul de Tarse.
Il se mêle totalement au récit, puisque comme il le dit « à un moment de sa vie, il a été chrétien. », mais manifestement il ne l'est plus et il profite donc du recul nécessaire pour nous faire revivre ces premiers moments du christianisme après la mort de Jésus et ce, en témoin détaché mais très curieux de cette époque.
C'est foisonnant, c'est à la fois très minutieux et très cool aussi, ça se lit comme une enquête journalistique très moderne en fait.
Plus de 600 pages et je n'en suis qu'à la moitié ! Mais chaque page est un pur régal.
Jusqu'à présent, je n'avais jamais rien lu d'Emmanuel Carrère sans être vraiment tenté de le faire après l'avoir vaguement entendu intervenir en radio ou vaguement vu à la télé et donc sans jamais vraiment « percuter » sur sa personnalité médiatique et promotionnelle.
En fait, c'est un ami, non croyant comme moi, qui m'a simplement conseillé de lire « Le Royaume ». J'ai tardé à m'y mettre mais maintenant c'est tout bon !
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 04/03/2015, à 08:21)
#120 Le 04/03/2015, à 11:53
- Ayral
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
Emmanuel Carrère est le frère de Marina Carrère d'Encausse (journaliste et toubib sur France 5) et fils de Hélène Carrère d'Encausse académicienne.
J'avais lu sa biographie de Édouard Limonov, intéressant mais bon ça m'avait pas passionné. Sa vie politique ambiguëe (celle de Édouard Limonov) me laissait perplexe.
Pour mettre les retours de commande entre deux balises code, les explications sont là : https://forum.ubuntu-fr.org/viewtopic.php?id=1614731
Blog d'un retraité
Site de graphisme du fiston Loïc
Ubuntu 22.04 LTS sur un Thinkpad W540
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#121 Le 07/03/2015, à 08:03
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
- Un numéro hors-série de « Philosophie Magazine » daté mars/avril 2015 intitulé « Le Coran » : à la fois passionnant et précieux (7,90 € quand même ! mais il devrait se trouver dans toutes les bonnes bibliothèques...)
Nombreux contributeurs de tous bords, de toutes nationalités et confessions (politologues, chercheurs, islamologues, philosophes, historiens ) à ce numéro spécial qui tentent de répondre à quelques questions importantes au sujet du Coran.
Q'est-ce que le Coran ? D'où vient-il ? Que dit-il ? Le Coran et les fantasmes de l'Occident etc...
Le tout accompagné de très utiles tableaux philologiques, de repères chronologiques et de lexiques et d'une table d'orientation des différents courants...
Le numéro se termine par un entretien pas facile à lire mais de très haut vol avec le philosophe et historien Marcel Gauchet qui soutient une thèse passionnante allant à contre-courant de beaucoup de points de vue actuels. J'essaie de résumer : non, contrairement à ce que l'on pense, nous n'en sommes pas à un retour du religieux mais bien au contraire à une sortie du religieux. Car, loin de témoigner du retour du religieux, le fondamentalisme actuel serait plutôt l'expression ultime et rageuse de l'éclipse des religions à l 'âge de la mondialisation et d'une sécularisation qui gagne le monde, certes à des vitesses infiniment diverses et à des degrés infiniment variés selon les lieux et les cultures, mais qui n'en finit pas d'avancer, de toute façon, qu'on le veuille ou non...Point de vue étayé par de très nombreux arguments sérieux et probants...
+
- N° 87 de Mars 2015 de Philosophie Magazine intitulé « Guide d'Auto-Défense contre le fanatisme » avec, entre autres, un dialogue intéressant intitulé les « Versets de la discorde » entre Rémi Brague (spécialiste de philosophie antique et médiévale) et Abdennour Bidar (auteur de nombreux ouvrages sur l'islam) : on part de quelques versets du Coran sujets à diverses interprétations (et souvent à polémique) et chacun des deux intervenants donne son point de vue et son éclairage personnel...
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 07/03/2015, à 08:06)
#122 Le 07/03/2015, à 13:42
- xabilon
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
J'ai lu la semaine dernière "Sur les épaules des géants" de Stephen Hawking, où il revient sur les grands scientifiques de l'histoire européenne (Kepler, Galilée, Copernic, Newton, Einstein...), tout en tordant le cou à certains mythes et légendes ; ainsi, rien n'atteste que Galilée eu murmuré "et pourtant elle tourne", et de toute façon il n'avait trouvé aucune preuve scientifique irréfutable de la rotation de la Terre...
Certains scientifiques se voient aussi égratignés dans ce qu'on leur attribue, on apprend que Isaac Newton n'a pas découvert la gravitation, mais a réussi à la formuler mathématiquement.
Et sur le rôle parfois cruel de l'Histoire ; ainsi elle glorifie Einstein, mais elle oublie totalement Henri Poincaré ou Georges Lemaître.
Et je me suis mis à relire "La Cité des Permutants" de Greg Egan, que je n'avais pas compris il y a 15 ans...
Dernière modification par xabilon (Le 07/03/2015, à 13:43)
Pour passer un sujet en résolu : modifiez le premier message et ajoutez [Résolu] au titre.
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#123 Le 07/03/2015, à 18:39
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
J'ai lu la semaine dernière "Sur les épaules des géants" de Stephen Hawking, où il revient sur les grands scientifiques de l'histoire européenne (Kepler, Galilée, Copernic, Newton, Einstein...), tout en tordant le cou à certains mythes et légendes ; ainsi, rien n'atteste que Galilée eu murmuré "et pourtant elle tourne", et de toute façon il n'avait trouvé aucune preuve scientifique irréfutable de la rotation de la Terre...
On peut faire confiance à l'imagination humaine pour faire des centaines de fromages qui finissent par n'avoir plus qu'un lointain rapport avec le "fait historique réel et original" de départ. C'est d'ailleurs un truc qu'on peut vérifier à son propre niveau : en retravaillant récemment sur une vieille photo argentique, et en développant d'autres prises au même moment il y a très longtemps, j'ai pu vérifier que l'histoire que j'avais retenue de la photo en question n'était pas la même que celle racontée clairement par celles que j'avais prises au même moment et que j'avais totalement oubliées depuis.En fait, je m'étais raconté une histoire à propos de cette photo et j'avais même fini par y croire mordicus alors que là, avec les autres photos prises au même moment, j'ai la preuve que ça ne s'est pas passé exactement comme ça. En somme, on réinvente le passé comme ça nous arrange, quoi...
Et je me suis mis à relire "La Cité des Permutants" de Greg Egan, que je n'avais pas compris il y a 15 ans...
Etre une copie de soi-même, est-ce continuer à être soi-même ? C'est la question que se pose Paul Durham tandis qu'il multiplie ses doubles informatiques.
Et il fait une découverte bouleversante : c'est qu'un univers virtuel conçu d'une certaine façon n'a plus besoin d'un support matériel pour exister. L'univers réel peut disparaître, le virtuel poursuivra son expansion. Eternellement.
Paul Durham se demande avec quels êtres peupler sa Création.
La Cité des permutants est probablement le livre le plus novateur de ces dix dernières années. Greg Egan, Australien, est l'étoile qui monte au firmament de la science-fiction mondiale.
http://www.noosfere.com/icarus/livres/n … re=-327280
En voilà une bonne question ! Et une drôle de perspective !
C'est un sujet qui a l'air diablement intéressant mais...inquiétant aussi !
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 07/03/2015, à 18:43)
#124 Le 07/03/2015, à 19:17
- xabilon
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
Effectivement, les questions soulevées sont vertigineuses, concernant la conscience et la matière, l'espace et le temps...
De plus, il y a un côté hard-science/métaphysique autour de l'informatique qui devrait plaire aux geeks de ce forum.
Pour passer un sujet en résolu : modifiez le premier message et ajoutez [Résolu] au titre.
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#125 Le 20/03/2015, à 17:56
- Compte anonymisé
Re : Qu'est-ce que tu lis en ce moment...?
« Soumission » de Michel Houellbecq : difficile de faire la part des choses entre la personnalité médiatique de l'auteur, le foin médiatique spécial autour de ce bouquin spécial et le bouquin lui-même et son narrateur fictionnel.
En essayant de rester concentré sur le bouquin lui-même, moi je dirais d'abord = « soumission » à la désespérante personne du narrateur de l'histoire. Oui mais pas que.
Ce bouquin, quelque part, nous raconte que le narrateur (et à travers lui, peut-être, l'homme occidental ?) n'en peut plus de ses trop grandes libertés, de sa trop grande individualité, de sa trop grande solitude, de sa trop grande sécularisation, de son trop grand agnosticisme et que ça pourrait le soulager de se débarrasser de ces lourds fardeaux en se soumettant à l'islam (ou en faisant semblant de s'y soumettre?) islam qui présente, pour le coup, de nombreux avantages : entre autres, plusieurs épouses -et très très jeunes possiblement - et de sérieux avantages matériels pour ce prof d'une université de Paris-Sorbonne devenue islamique et financée par les riches pays du Golfe.
En mettant de côté toute la part de fiction improbable (ne serait-ce que la façon dont la France se trouve un leader musulman charismatique et consensuel qui résout tous les problèmes sociaux économiques du pays en un tour de main et la façon pacifique dont les choses se passent), je trouve que c'est parfois franchement désespérant par moments tant le narrateur raconte cette histoire comme si il était totalement étranger à lui-même -ce qui me fait un peu penser à « L'Etranger » de Camus par moments- , tant il paraît totalement indifférent à l'humanité et à l'actualité qu'il est supposé vivre, tant il a l'air détaché de tout et dégoûté de tout … Mais je trouve aussi que c'est franchement désopilant à d'autres dans la manière dont il raconte ses histoires de cul, son appétence pour les jeunes chattes, pour les bonnes bouteilles et à travers les portraits qu'il dresse de certaines personnalités connues -Bayrou, entre autres- et le détachement opportuniste avec lequel il endosse l'islam et « ses avantages ».
Franchement, toutes les 3 pages en moyenne, je suis plié ! Et... consterné à d'autres (comme à son absence totale d'affect à la mort de ses parents et à autrui en général...) Mais j'ai l'impression qu'il (je parle de l'auteur, là) fait exprès, qu'il pousse le bouchon aussi loin que possible pour que son apparente inhumanité suscite des réactions : il dit d'ailleurs quelque part que « l'humanisme le fait vomir ». Un étrange dégoût de tout, une profonde paresse, une profonde indifférence blasée aussi parcourent d'ailleurs l'essentiel de ce livre...
Etrange fiction que cette « Soumission »...
Je ne trouve pas que c'est un grand livre tant le style est paresseux et sans éclat. Tant la « grande mutation » de la France apparaît dans ce roman tout d'un coup, sans transition, avec de gros sabots, sans une vraie narration et une vraie analyse qui la rendrait plus crédible.
A mon avis, Houellebecq ne joue pas certainement pas dans la même division qu'Huxley et Orwell...
Dernière modification par Compte anonymisé (Le 20/03/2015, à 18:03)